Douze, de graff en rap

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Ce blog meurt mais ne se rend pas.

Telle la garde des mc’s et beatmakers « in all styles » qui font que le rap est loin d’avoir dit son dernier mot. La plupart de ceux qui aujourd’hui sortent de la bouche de leurs pairs (?!!) formatés jusqu’à oublier qu’en cherchant bien il leur reste quelques connexions neuronales, est définitivement oubliable (on est gentils).

Parallèlement à ce… hem… game ? panier de crabes? marigot? cloaque?… oeuvrent des artistes. Au plein sens du terme.

Venu du graffiti dans une époque bénie de multidisciplinarité,  Douze (Douze Ekzéko Keskler pour les intimes 😉 ) en est un exemple notable. La preuve même que la réflexion d’un cerveau est compatible avec le va-et-vient de son contenant remuant à s’en fracturer l’occiput!

Son background et ses convictions ne pourraient être mieux résumés que par ces vrais passionnés qu’on peut qualifier de site de référence.

interview Douze

Quant au présent, le tout récent opus Samples et tensions (sorti avec 5 jours d’avance, svp!) démarre en trombe avec un terrassant « Remords et comptes nuls », qui s’offre le luxe d’un fading sonique d’une rare élégance.

La suite est sans temps morts. Et brillamment estampillée Ekzéko Beats, en alternance avec la part belle faite à quelques collaborations triées sur le volet. Dont celle d’un certain parrain de la street, illustrant dans la foulée la possibilité d’une île. D’un havre de paix, d’une coexistence entre courants, mouvements, écoles, au lieu de cette loi pachydermique du marché -mille excuses à tous les proboscidés!

Nul besoin de clips calibrés pour toucher la cible, relativement mouvante mais toujours immobile à l’heure où les grands fauves vont boire. Ni de commentaires redondants que personne ne lira.

Alors voilà : le bail s’est fait, et à sa modeste manière il fera date.

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Ajout strictement O-BLI-GA-TOIRE, le 10 janvier 2017 (salutations distinguées) :

avec ce genre de baffe supplémentaire, le concept de la Poignée de punchlines de Give me 5 Prod et son instigateur Djo Deparone ne risque pas de s’essouffler.

Wooosh!!!!!!!!!

 

 

 

10 carrés d’as du rap indé 2015

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Tiré brutalement de son sommeil à l’aube (de 2016, pas sur le mode ci-dessus), ce blog de feignasse repart, de manière très cohérente, sur un article de feignasse.

C’est-à-dire la reprise in extenso ou presque, d’une série de statuts fb perso, à cheval sur le 31 et le 32. Voilà, c’est bien fait pour vous, un best of 2015 de plus… c’est la faute à Niko, il se reconnaîtra peut-être ^^

La thématique : rap français indé à fond les manettes, sur la formule quasi idéale du 4tet. L’empreinte du jazz ? A vous de juger… c’est parti, dans le désordre d’une inspi s’alcoolisant au fil de la nuit et vice versa (ben quoi? fallait pas le dire?!)

  • dernier partage d’une année riche en collabz de qualité… Smoki/Nasme/Zicler/DayellBeatz, 3 mc’s/1 beatmaker, vais creuser le concept (juste en tant que fan, hein !)
  • soirée papy, la ‘tiote endormie depuis 3 heures… fingers in the nose pour enchaîner sur le post précédent. Autre quartet majeur de 2015, Paco/10vers/(Papy) Ritzo/Toxine : Respect !
  • ok, le concept est élastique… petite tricherie innocente pour s’offrir un quintet franco-suisse de première bourre, avec Mani Deiz à la prod intégrale de l’album le plus achevé de décembre : celui de Ham mauvaise graine, à coup sûr on en reparlera (tout comme de Geule Blansh, Sentin’l et Ol Zico)
  • Rskp à la vingtaine, Nefaste est déjà une valeur sûre à son premier solo. TOUS les titres de Premier pas déchirent leur race, alors si Omerta Muzik (Melan, Toulouse) et Pur East (Lyo, Besançon) se mettent au diapason sur cette instru estampillée Ben Maker !
  • peut-être LE bon son de l’année ! Ou le Madrigal en quatuor : les cordes pour EkzekoBeats , sur une section rythmique de mc’s à la précision vocale chirurgicale (Das Raizer/Douze/Funky Armenico). A savourer sans clip mais avec protège-dents…

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https://madrigalproject.bandcamp.com/track/monteverdi

(petit coup de mou et trou breton… A suivre ?)
  • fin de la pause, c’est reparti. Beau jeu, non ? Et ceux qui arrivent là tout de suite, c’est comme si tu fais rentrer à la mi-temps Verratti, Di Maria et Ibra… bon ça va râler un peu mais après tout Laurent Blanc est presque de Montpeul aussi. Comme Nedoua, Lacraps et Melis du team LaClassic (pas Diaz, mais on l’excuse)
  • une sélection annuelle sans DJ Blaiz, c’est comme un poisson sans bicyclette! Plus L’indis et Lavokato (Les 10′) épaulés par Nakk Mendoza, ça donne une des nombreuses pépites d’Appelle-moi MC 2, le truc qui a lancé 2015 sur les bases les plus basiquement basiques…
  • … de même que le démoniaque Dragon Rash de Demi-Portion, strictement impossible à zapper. Et la seule combinaison en trio (« orchestrée » par Douil)  l’associe à Jeff le Nerf et Neka, par ailleurs coupables de rapper vraiment très très très fort sur leurs derniers opus respectifs
  •  règle du jeu : ne citer qu’une fois un mc ou beatmaker. L’indis et Jeff le Nerf « grillés », à qui associer L’hexaler à l’heure qu’il est? qu’à cela ne tienne, Scylla et Rockin’ squat pour assurer un point de suture cousu par Bilbok ça le fait aussi allez hop!
(j’aimerais bien un 10ème son les amis, je m’essouffle)
  • pas de propositions ? Normal, les artistes c’est vous et moi le « chroniqueur ». Je casse piteusement le règlement pour boucler mon top 10 ! Un mc déjà cité, pour accompagner deux « oubliés », dont l’un s’occupe en plus de l’instru. Ham+Sekel du Neufun (aussi à la prod)+Dino Killabizz… DU LOURD!!!

Très sobre conclusion (au soir du 33) : qu’en pensez-vous?

 

Monk.e, retour gagnant : Jeu, set et match !

Médaille d’or olympique de crowd surf selon une estimation objective, Monk.e n’avait pu se risquer à ce périlleux exercice dans le contexte intimiste du concert donné à la bibliothèque Couronnes en mai 2014. Aucune difficulté à nous remémorer cette journée. Trop pluvieuse pour être honnête, trop peu partagée pour être pleinement gratifiante, mais illuminée par son charisme et sa bonne humeur.

Une après-midi de peinture, une heure et demie sur scène en soirée ! Et dans la track list, trois bons quarts de l’album « Initiatique » qui venait de paraître…

Un an plus tard, voici donc venir son successeur « Esclavage, Exode et Renaissance », cinquième solo d’une discographie à nulle autre pareille. Ne serait-ce que parce qu’elle s’inscrit dans le cadre d’une folle activité, à rendre caduque la simple notion de nervous breakdown.

Etant donné que le maître d’œuvre a choisi la forme du triptyque dans la construction, pourquoi s’écarter du canevas ? C’est parti, accrochez-vous le chemin vers la lumière est magnifique mais escarpé!

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Esclavage

Le griot de Drummondville n’est pas de ceux qu’on musèle, et la critique sociale est constamment en filigrane. Mais il a l’humilité de s’inclure dans la dénonciation de nos errements collectifs.

Coca-colanisation : Rien que le titre pourrait donner des sueurs froides à Akhenaton (mais quelle tsé-tsé a donc piqué notre Akh?!). Sur fond sonore de street riot la voix doucereuse s’adresse ironiquement à l’autorité policière, donnant le ton de ce premier volet. Un riddim dancehall, une instru aigrelette signée du complice Kenlo Craqnuques et une rageuse concision, pour un démarrage en trombe…

Cashdown : Le clip qui nous a mis l’eau à la bouche et la puce à l’oreille (paf ! dans la gueule, conclusion coluchienne). Tout aussi dense et revigorant, mais cette fois c’est la rythmique trap de PSTV (Positive) qui a en charge de coller au propos acéré. L’adéquation n’est pas immédiatement évidente, mais dans le carquois de l’alchimiste québécois on fait toujours flèche de toute prod.

Ballin’ !!

 

Sages de sillons : La première des six contributions soniques de Sev Dee. Profusion est le mot qui vient tout de suite à l’esprit. Profusion verbale et instrumentale (et picturale, soit dit en passant : quelle pochette !), sans oublier celle du cœur. Fort de l’assurance exempte de tout moralisme où l’a mené son parcours personnel, le « b-boy érudit qui étudie sur l’asphalte » égrène sans complaisance ces travers qui nous aliènent encore et toujours, en dépit de la connaissance acquise…

Rêver d’être éveillé : Dans la continuité, philosophiquement parlant. La tonalité d’ensemble plutôt apaisée bénéficie de la diction au scalpel du rappeur anglophone UrbN LogiX, déjà de la partie sur « Destin & beyond » (2012). Quant au sample mélancolique de vibraphone choisi par Vincent Pryce , il constitue une trame parfaite pour un duo de mc’s combatifs aux flows si manifestement complémentaires.

Les poumons égarés : Texte et atmosphère d’une subtilité décapante, sur une énorme instru de Sev Dee, de facture quasi-« canoxienne ». Le titre fera d’ailleurs l’objet du prochain clip tourné au Kenya. Il entame ce que nous considérons comme le plat de résistance de l’opus, soit une suite magistrale de 27 minutes menant à la fin du deuxième chapitre intitulé Exode…

Ce qui rend plus trivial notre découpage façon entrée-plat-dessert (4-8-4 au lieu de 7-5-4), que ceci nous soit pardonné !

Yoseph : Relativement dépouillé côté beatmaking (Sev Dee encore), « Yoseph » nous rappelle la puissance incantatoire de « Chers Elohim » (Initiatique) dont il diffère pourtant largement. L’apparente tranquillité du morceau, que renforce le flow élastique de Iblast, est trompeuse. Monk.e est bien là dans son registre le plus offensif, qui ne relève pas plus du prêche que sa spiritualité ne témoigne d’un quelconque dogmatisme.

Heaven help dem : A elle seule, la présence de Kendrick Lamar ferait le buzz, si c’était là le but premier de notre globetrotter préféré. Mais à la notoriété de ses invités, il préfère l’appartenance à une même famille artistique. Ce qui est d’ailleurs le cas du troisième larron Jonathan Emile, membre du collectif Kalmunity à l’origine de cette collaboration fructueuse. Quant à la thématique, les exactions des pouvoirs de par le monde sauront toujours lui fournir la matière, hélas !

 

Exode

La représentation classique du sage le montre dans une posture statique et réflexive, sous le chêne ou le banian (entre autres stéréotypes botaniques). Pas dans celle d’un ludion extraverti parcourant la planète en long, en large et en travers. Et pourtant…

Ciclos : Croisé au cours de ses nombreux voyages au Mexique, l’ami Lengualerta avait forcément sa place réservée sur EER. En toute logique, l’album (compilation de titres inédits de la période 2008-2014) se teinte avec lui d’une nuance plus optimiste. Pour autant, ne pas se fier totalement à la très pimpante couleur latino reggae d’un morceau traduisant une certaine insatisfaction. « Partir et partir encore, partir pour revenir plus fort »…

Alchimiophonie : Si cela ne tenait qu’à nous, on élèverait à Toast Dawg une statue aussi haute que celle du Corcovado (visuel de son diptyque « Brazivilain », rappelons-le aux non initiés). Ce beatmaker sait tout faire, y compris concocter à l’intention de Monk.e le son le plus éthéré des seize fournis. Celui qui nous renvoie quelque part à l’ouest de la Voix Lactée, où nous avait transportés l’année dernière « Initiatique», aux bons soins de Smilé Smahh.

Intimité stellaire : Hein, qu’est-ce qu’on vous disait ! dans les familles Kalmunity, Amérythmes ou Nomadic Massive, je voudrais les Quatre Grâces… Mafé, Meryem Saci, Sola, Caro Dupont : si on n’a pas ici affaire à une constellation, alors c’est que Monk.e est le successeur du pape François. Ce dont nous doutons fortement. Il faut le savoir, il n’est point d’album de Monk.e sans une ode vibrante à l’éternel féminin…

Le Mozart de nos âmes : Parmi les trois Français présents, Artik le mc et Tayreeb à la prod ne déparent pas en terrain piu piu. On pourrait le croire un peu mouvant pour le débit syncopé de freestyler du champion du monde End Of the Weak 2006, mais il n’en est pas à un défi près. Au demeurant, ces deux-là se connaissent suffisamment pour être un parfait complément au plus beau fleuron canadien du challenge EOW.

Spectrum : A Sev Dee le soin de boucler instrumentalement le cycle Exode. Seul du noyau dur de K6A (adeptes assidus de la double casquette mc-dj) à se cantonner dans l’élaboration de beats en tous styles, il s’en acquitte avec son brio habituel. Sur ce morceau peut-être le plus achevé de tous, qui dégage une impression de sérénité peu commune, Monk.e se balade littéralement. Les nappes onctueuses du grand maître des soirées ArtBeat Montréal sont faites pour lui.

Renaissance

Monk.e est l’antithèse des trop fameux « singes de la sagesse ». Il est celui qui voit tout, entend tout, dit tout. Mais le sage n’a pas d’obédience. Autant pour ceux qui le voient comme une sorte de gourou.

Bilan : Pareil terme pourrait annoncer un testament artistique, mais il n’en est rien. Mis en musique par Jam, sur le mode très cool qu’on lui connaît (un peu soul, un peu boom bap), « Bilan » décrit en fait la maturation d’un homme vers l’âge véritablement adulte. Celui où, loin de considérer le savoir acquis tel un moyen de domination, il en use désormais comme de sa meilleure chance d’évolution personnelle. A signaler le carré d’as estampillé K6A, P.Dox et Smilé complétant cette donne royale.

Fou folie : Que le minot Kaytranada (membre éminent d’Alaiz) soit le support sonique supersonique de cette track, probablement la plus distanciée de EER, nous ravit. La vague, la vogue, la hype, le hip du hop, le hop du hip, tout ça c’est une chose, mais rien ne vaut le fer forgé sur l’enclume old school. Ceci n’est en rien une attaque, car contrairement à ce que l’on constate en notre proximité immédiate (Belleville reprends-toi !) la synergie se fait ici spontanément. A réécouter sans modération…

3 lil’ birds : Dans la foulée, tirons une bonne fois pour toutes notre galure à Sev Dee, dont on attend impatiemment l’association avec FiligraNn, grand ordonnateur des redoutables WordUp! Battles. Lui seul DEVAIT procurer au raton en chef le socle de cette association trilingue incluant Lengualerta et «el neo-reconquistador» Boogat, figure bien connue de la scène montréalaise. Comment ne pas adhérer à cette allègre philosophie, inspirée par le musicien le plus universel qui fût ?

Royaumes : La voilà donc in extremis, la prod de Gyver Hypman qui augure de l’album commun à venir, un peu retardé mais toujours d’actualité. Une bonne dose de tendresse et d’émotion en guise de conclusion à cet opus totalement réussi, généreux, plus accessible que les deux précédents, et d’une cohérence absolue en dépit de la volubile diversité qu’implique son concept.

Alors, pour le plaisir et par procuration : merci Maestro !?!

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Appelle-moi MC, volume Scud

Pour notre premier anniversaire, on se devait de pondre un billet. In extremis, à trois quarts d’heure du terme (26 février à 0h00), voilà qui est fait ! D’avance cher et nombreux lecteur de Trégonneau-Squiffiec, Côtes-d’Armor, veuille excuser tout enthousiasme superlatif, toute allusion acrimonieuse, tout dérapage incontrôlé -quoi que, tout bien considéré, on sait se tenir, hein ?

Blaiz’, deuxième acte

Il y a cinq ans paraissait « Appelle-moi MC »… L’une des plus brillantes compilations de l’histoire du rap français, à une époque où il en avait sacrément besoin. Quoi de plus logique que de retrouver ce niveau de qualité sous la houlette éclairée du même DJ Blaiz’, pour un volume 2 qui fleure bon l’indé ! On ne va pas faire dans la dentelle, ce skeud-là est un scud, qui bonifie encore un début d’année plutôt réussi.

Parce qu’il regroupe une grande partie des rappeurs et beatmakers qui constituent aujourd’hui une sorte de panthéon aux yeux des aficionados. Et lorsque ces derniers le sont de longue date (suivez mon regard en dedans), ils n’ont aucune peine à se situer dans le paysage.

« On dit qu’c’était mieux avant/ Mais j’étais là avant/ Si tu veux j’te r’fais le décor/ Mais son corps n’est pas excitant… »

Cultivons le paradoxe, la phase est signée Nasme. Autant dire un pilier de l’affaire en 2010, absent du track-listing de 2015. Piqûre de rappel, seringue bourrée jusqu’à la gueule de bonnes références :

 

Pas d’échappatoire possible : la mif’ est cernée, on n’en sortira pas autrement que les pieds devant. C’est une image bien sûr, puisque rap, littérature et cinoche sont faits pour s’entendre… simplement ça ne convient pas à tout le monde que « le rap coupé à la variète on cautionne pas du tout »! (Flynt)

Aucun élitisme dans cette affirmation, et encore moins de mépris. Qu’il s’agisse des artistes eux-mêmes, d’une presse nouvellement acquise au genre, ou des kids dont les goûts s’affineront, chacun son truc, comme on dit -et on dit bien, en l’occurrence… Juste une chose : même s’il ne sortait jamais son solo, le « Biffmaker » aurait plus fait pour la cause que les collègues à quelques milliers de K€ ou K$ en chiffre d’affaires !

La famille hip-hop en question englobe toutes les écoles, tous les styles, et tous les degrés de notoriété possibles, et ça fait de la matière ! Elle ne se définit jamais d’après son ancienneté, mais selon sa capacité à surfer dans le creux de la vague -le tube, pas visible du grand public massé sur la plage… Un exercice dans lequel bien des locomotives (mdr) du moment se casseraient la gueule en beauté.

S’il y a des biftons à prendre, pourquoi pas ? Mais s’ils sont chasse gardée, pour cause de modèle économique unique, on attendra. Et surtout, on luttera. Plutôt que de présenter son envers tout en chiquant au marlou. Et pourtant « j’s’rais tranquille à vie/ Si j’coupais l’doigt de P Diddy » (Paco)

 

Et maintenant, si on se faisait une punchline de quatre minutes? Ce n’est pas très éloigné de ça, et sans l’image qui parfois déconcentre elle n’en prend que plus de poids :

 

Première Ligne, deuxième salve

Voici près de deux ans, sous le titre de « Hardcore pas mort » le petit article qui suit avait fait un tabac sur notre page Facebook : deux likes !

Test two, in extenso… le choix de la fainéantise, mais que voulez-vous : il est déjà tard pour un bébé d’un an…

Chez Bboykonsian, on est autonome. Un collectif, un label, un webzine, une maison d’édition… et un combat. Violence verbale raisonnée. Si elle vise le flic honni, c’est la fonction et non l’individu. Ni mythomanie galopante, ni apologie gerbante. 

Rien à voir avec les « icônes » si gracieusement écloses d’un cocon ouaté confondu par mégarde avec le ghetto.

Ces types-là, plus quelques autres gravitant sur la même orbite, savent structurer un son autant que se structurer eux-mêmes. Balancer d’emblée la sauce poisseuse d’une atmosphère qui englue irrémédiablement. Histoire de ne laisser à l’auditeur d’autre choix que celui de la réflexion…

Comme les six nouvelles du livre-cd « A couteaux tirés » paru en 2013 chez Syllepse (consultez le catalogue, ça vaut son pesant de littérature engagée).

Pas un perdreau de l’année, l’auteur! Skalpel, rappeur d’Aulnay et d’Uruguay, 34 ans, et suffisamment d’inspiration pour en être déjà à son deuxième recueil. En plus de 6 solos dont celui-ci, et 5 Ep’s et albums en deux groupes successifs.

Du pur storytelling : le constat brut, pas la gloriole factice. Conneries assumées, gueules pétées, défonces revendiquées, cicatrices visibles, et la rage à flot, encore et toujours. La vie quoi, disent doctement ceux qui en sont à 20.000 lieues… 

Avec Guez (non, pas de Balzac m’enfin ! revoyez vos classiques), Skalpel constituait un tandem assez redoutable au sein de la K-Bine. Groupe né de ses cendres encore ardentes, Première Ligne a publié en mars 2013 son premier opus collectif. E.One l’autre MC s’y révèle pas maladroit non plus côté prods, et DJ Akye le Bboykonsian originel y distille toujours sa science du scratching. 

Ce trio représente l’essence même du hardcore, dans sa dimension de lutte sociale. 

Un passé, un présent et un futur de militance de l’asphalte hurlante. Celle qui se confectionne elle-même ses bannières, si besoin est… (mars 2013)

On n’y change pas un mot. Première Ligne aussi, c’est la famille. Ils enverront leur deuxième salve très prochainement, et ça fait du bien.

 

Ce blog avait un an, merci, à bientôt.

 

Le rap, ce sera toujours mieux (indé)pendant !

Ce blog a bientôt un an. L’âge où toute la famille est convoquée au chevet du bambin pour s’extasier sur ses progrès stupéfiants. Vous êtes priés de remplir de ah! et de oh! la ligne suivante.

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Merci, fermez le ban. Et maintenant

 

On ne s’en lasse pas, de ce comique de répétition… D’ailleurs, ce n’était pas très enthousiaste. Bien l’impression qu’il manque du monde.

En matière d’infidélité, on a vu pire ces derniers temps. Tant de causes démarrant en feu de paille pour se terminer en eau de boudin, ça finit par faire une mélasse dont il est difficile de se dépêtrer !

Bien. Où en étions-nous ? Ah oui, la famille. Familles, je ne vous hais point, mais à une condition : ne laissez plus personne vous qualifier de tribus ou de clans. Pure stratégie de lobbies médiatiques, pas nécessairement publicitaires au demeurant, divisant sciemment pour mieux vendre leur soupe.

Ce qui, de près ou de loin, et aujourd’hui pas plus qu’hier, ne peut convenir au rap (écoutez Papi, les enfants). Musicalement œcuménique, intrinsèquement démocratique, il reste la voix du peuple. S’il était replié sur lui-même, nombre de ses représentants se seraient reconvertis depuis un bail, tant il est plus facile d’y gagner des pépins que des pépètes.

De fait, il y a des pépites à en extraire chaque fois que son expression est libre et combative… on va commencer par celle-ci, qui illustre à merveille notre propos :

 

C’est tout ce qui nous intéresse, plutôt que de verser dans une de ces querelles anciens-modernes qui ne feront jamais que la joie des académiciens, en herbe ou de tout poil. Le hip hop reprenant à son compte les conventions dont est censée le démarquer toute l’essence du mouvement, voilà qui serait aussi suicidaire que désopilant (oui, on aime bien se marrer avec le canon sur la tempe, chacun sa came).

Aussi le slogan « c’était mieux avant » apparaît-il comme un simple libelle, un gimmick futé destiné à être réfuté. Il l’a d’ailleurs été, avec le grand mérite d’aiguillonner par la même occasion la verve littéraire de quelques-uns, dont les deux ci-dessus. Certainement pas un hasard !

 

L’album à venir de Kaot’F , si souvent reporté, jamais abandonné, s’intitule « L’écoute et l’entente »… est-il utile de développer le concept ?

Une vraie famille n’est jamais fermée, sa plus noble fonction est d’accueillir. Et non pas d’intégrer, nuance ! D’intégrer à ingérer il n’y a qu’un t pas très dansant.

Dans la vidéo qui précède sont personnifiées les composantes essentielles de ce qu’on continuera à nommer le vrai rap. Celui qui se fout éperdument du buzz, du compteur de vues (truqué par définition) et de la direction verticale des pouces pavloviens. Celui qui réunit de leur propre chef une douzaine d’artistes de notoriété variable selon leurs affinités, et non sur un coup de marketing. Celui où l’on retrouve régulièrement des baroudeurs du freestyle en rupture (provisoire, parce que l’exercice est addictif) de Rap Contenders ou End Of the Weak. Une référence, un label de qualité aussi motivant côté fosse que côté scène…

Celui aussi dans lequel le premier à balancer ici ses huit mesures, l’archétype du rappeur aussi indépendant qu’entreprenant, voit une armée potentielle en marche.

Mettez une douzaine de Nasme, de Sëar et de Flynt dans le rap français, et il se gagne à la fois un avenir, l’émergence de talents cachés et la mise en retrait, sinon en sommeil définitif, des petits manitous ignares qui nous bombardent de leur daube en conserve avariée. A 7:18 si vraiment vous n’avez pas le temps de voir ce docu en entier, il y a de quoi espérer en des lendemains qui chantent moins faux.

 

Pas d’hypocrisie. Perchée plus ou moins discrètement sur nos baromètres, la grenouille YouTube continue de coasser ses prédictions lénifiantes. Grâce à nous qui lui donnons les moyens d’atteindre la taille du bœuf…

Stoppons cette enflure, cessons d’être des bœufs !

 

Rap queb à la folie (douce)

Rien à faire ! Le rap hexagonal a beau vivre actuellement la résurgence de monstres sacrés, la reconnaissance tardive de soldats de l’ombre, ou l’éclosion de jeunes pousses, un seul sujet motive les gazettes.

Pour notre part chers lecteurs (qu’est-ce qu’on est bien en si petit comité !), oublions momentanément les galipettes amoureuses du duc de Boulogne et du marquis de Sevran, il n’y a pas que le cul dans la vie. Aucune péripétie de leur interminable idylle ne nous étant épargnée, on retournerait bien prendre un bol d’air vers l’Ouest, pas vous ?

Non pas notre Ouest à nous, même si là-bas aussi il y a du nouveau, remarque… Mais bien au-delà des phares du Créac’h et de Nividic, en piquant droit sur la Nouvelle-Ecosse, puis l’embouchure du Saint-Laurent. Vous y êtes déjà ? Attendez-nous, on arrive.

Remontons maintenant le fleuve, pour une nouvelle et passionnante aventure à la rencontre de ces étranges autochtones qui se disent nos cousins, comme c’est bizarre -on dirait les belles histoires de l’oncle Paul, hein?

Alaclair, plus frappés que Fontaine

Au cours de notre première exploration, nous avons un peu zappé la capitale, dans notre hâte à rejoindre Montréal où presque tout se passe. Jouxtant Limoilou dont on vous a déjà parlé (Webster et consorts) se trouve le quartier de Saint-Roch, l’occasion de faire une riante halte -ce n’est plus l’oncle Paul mais le jeu d’Emile Franc, désolé.

Pourquoi? Parce qu’à cet endroit « d’la frouche y en a plein d’sortes/ça débarque du bas du fleuve/din vannes vartes/ça finit les yeux toute plissés/comme un rootsman à Bangkok ». On n’invente rien, il s’agit là, dans un genre qui laisse sans voix les plus éminents linguistes, du témoignage incontestable signé Alaclair Ensemble sur « Toute est impossible » , leur dernière livraison (la première est ici, ne vous gênez surtout pas) :

 

Intéressant, non ?
Eux, ils l’appellent depuis belle lurette post-rigodon, mais vous pouvez préférer post-rap si ça vous chante. Ils ne boiront pas votre sang pour autant, ces pratiques érotiques n’existant que dans certaines familles de la noblesse d’épée du 9.2 et du 9.3.

Dans l’ordre de divine apparition :

Claude Bégin sur les choeurs évanescents, tout récent auteur de « Les magiciens », opus pop en concerto déconcertant mais son passé plaide pour lui, Votre Honneur (en outre, il peut bénéficier de la circonstance atténuante de vivre dans la capitale) ;

KenLo Craqnuques Tout’Nou (et alors? à Montréal, le post-rock a bien ses Thee Silver Mount Zion Memorial Orchestra & the Tra-la-la Band), cador de la piu piu et ex-comparse de prédilection de Monk.e quand celui-ci veut bien s’arrêter de bouger ;

Eman anciennement moitié d’Accrophone avec le premier nommé, et aujourd’hui moitié de Eman x VLooper avec… VLooper (leur commun effort « XXL » est terrassant) ;

Ogden alias Robert Nelson, Président de la République Libre du Bas-Canada, à qui on piquerait bien sa casquette en dépit de ses hautes fonctions, s’il ne faisait pas si peur ;

Maybe Watson l’inclassable, incassable, incasable et pourtant titulaire en 2011 d’une carte d’abonné à la bibliothèque municipale de Saint-Laurent, la preuve !

Mash, l’autre beatmaker et septième larron, est sur ces images invisible et silencieux, mais fort capable lui aussi de l’ouvrir à bon escient.

Mais laissons-les se présenter eux-mêmes, par le truchement de ce glossaire et de cette autobio d’une sidérante objectivité. Et puisque deux de ces messieurs sévissent également au sein de K6A, une petite rétro dont on ne se lasse jamais. Vous non plus, vous allez voir…

 

La veine humoristique d’un certain rap québécois laisse parfois à désirer, car dépourvue de tout alibi artistique. Avec Alaclair Ensemble, on tient un groupe dont le délire permanent s’appuie sur un savoir-faire musical indéniable.

Ainsi que le rappelait pas plus tard qu’around midnight Stephen Harper, Premier Ministre du Canada et souffre-douleur en chef, qui a gentiment accepté de poser (mais pas nu, c’est contre ses principes d’homme pudique) pour la pochette du susdit album.

 

Post-rap et poses trap

And now for something completely different…

Nous beaucoup aussi aimons ceux-ci, for example. Tout comme le public des TransMusicales de Rennes le 4 décembre, et un peu moins celui de la Flèche d’Or deux jours plus tard, comme c’est rebizarre (mais parisien, celi expliquant ceça et inversement, chié merde quoi).

 

Rappelons que le parti-pris des Dead Obies d’user d’une sorte d’espéranto pas toujours aisé à capter leur a valu la hargne de critiques musicaux (oxymoron ?) se découvrant pour la circonstance zélés défenseurs de la pureté sémantique. En France nous avons nos chroniqueurs fleur bleue obsédés par les croquignolettes tribulations des couples pipole, au Québec ils ont de rigoureux professeurs de Belles Lettres reconvertis dans la presse rap. Chacun sa croix…

Mais si vous êtes plus trap que post-rap, pas de souci. Vous avez le droit de vous jeter avidement sur les jeunes gens ci-dessous, en admettant que vous reveniez d’un long voyage dans le cosmos. Faites-le avant qu’il ne soit trop tard, et que leurs vêtements ne soient tout déchirés, tant les courants novateurs se succèdent là-bas si rapidement qu’ils se fondent les uns dans les autres !

La très bonne idée de Loud et Lary est probablement d’avoir fait appel en 2010 aux services (super)soniques de Ajust. Tout aussi bonne, celle de s’adjoindre ceux d’une équipe technique capable de leur torcher des clips à tomber à la renverse, en moins de temps qu’il ne nous en faut pour toucher le sol à plat dos.

Quant aux Posterz, élevés en fût à Vancouver avant de maturer à Montréal, leur premier cru est l’un des plus attendus de 2015, alors magnez-vous les jeunes !

 

Hardcore pas mort

Ah bon, c’est du hardcore que vous voulez?
Hé bien sachez que non seulement certains indigènes pratiquent encore ces rituels ancestraux des deux côtés du Saint-Laurent (parfois même dedans, et à plusieurs pieds de profondeur), mais en plus ils ont le truc dans la peau.

L’un des plus remarquables spécimens du genre renverrait sangloter dans son antre l’Hydre de Lerne soi-même. En effet, la multiplicité de ses têtes rend inefficace toute la gamme allant du coupe-chou de papa à la tronçonneuse de Leatherface.

Nous parlons là, avec les poils des bras dûment hérissés et des tremoli dans la glotte, du team Explicit. Au fil des années, ils ont acquis une envergure incontestée même des professeurs de Belles Lettres locaux ! Car si ces derniers comprennent tout ce qu’ils disent, l’inverse est également vrai. Même nous, avec pourtant un océan d’écart, on va en dire beaucoup de bien si vous n’y voyez pas d’inconvénient…

Très sérieusement, ce que font en ce moment les Souldia, Saye, Sadik, et on en passe dont le nom ne commence pas par S comme Sauvage, c’est très fort. A savoir, convaincre en à peine moins de seize ans (soit la durée d’existence du label fondé par 2Faces en 1999) qu’ils étaient capables de faire des disques et des concerts et pis tout ça sans mettre les Laurentides à feu et à sang.

 

Rigolez pas, on a lu il n’y a pas si longtemps, dans la presse généraliste de là-bas, l’article d’une brave dame envoyée toute tremblante au casse-pipe. Imaginez son soulagement, à l’évidence que ces monstres s’étaient en définitive fort civilement tenus, sur scène et en dehors.

Comme les MC’s cités viennent tous les trois de commettre individuellement leur crime lyriciste en tir groupé, découvrons-en trois de plus, dans l’excellente compagnie de K-Turnaz l’un des deux DJ’s attitrés du collectif (l’autre étant Fade Wizard) :

 

Si jamais tout ce beau monde se sentait une petite faiblesse bien compréhensible, nul besoin de chercher la relève. Quelques glorieux anciens tiennent tout aussi haut ce flambeau-là, et on ne serait pas étonnés de les revoir sous peu… D’avance merci.

Dragon Rash : Demi-Portion puissance Sète

Entamer la chronique d’un CD sur un éloge à son auditoire n’est pas forcément judicieux. Mais concernant celui qui a atomisé la concurrence, à quelques « rescapés » près, dès sa parution le 19 janvier dernier, on n’hésitera pas à le faire d’emblée.

Parce que la fidélité des fans de Demi-Portion n’a rien à voir avec l’idolâtrie bêtasse excluant tout sens critique. Il s’agirait plutôt d’amis, qui l’ont pour certains suivi depuis les années de galère. Des amis que Rachid Daif (à l’état-civil) ne peut bien sûr pas tous connaître, et à qui il rend cependant hommage à sa manière chaleureuse, dans le livret de l’enthousiasmant Dragon Rash qui caracole dans le peloton de tête des ventes de disques en France.

Des chiffres ? Pas question. Ce serait dénaturer la qualité intrinsèque de tout l’opus.

Ou plutôt si. UN chiffre : dix-neuf, comme le jour de sa sortie. Pour autant de morceaux certes pas parfaits (qui peut y prétendre ?) mais dont aucun n’est à zapper.

Car ce troisième solo, succédant aux prometteurs Artisan du bic et Les histoires, est d’une cohérence absolue. Bien dans la logique d’une trajectoire menant un gamin doué, timide et sacrément débrouillard, vers la reconnaissance que laissait prévoir sa ténacité sans faille. Et sans amertume, au regard de tant de faux rappeurs à « mettre à l’amende encore mieux qu’ces foutus PV »

D’entrée de jeu et à l’intention des non-initiés, deux minutes pour comprendre que la planète de Demi P n’est pas vraiment celle d’où certains confrères établis ne communiquent plus que par onomatopées. « Tous ceux qui parlent mal je laisse, inutile de gaspiller un seize » : le ton est donné, l’acuité textuelle une nouvelle fois au rendez-vous. La prod de Douil, jusqu’alors inconnu de nos services (publics) est impériale, mélancolique tout en évitant le piège classique du mélodrame, mélodieuse sans être melliflue (désolé, ça sonnait trop bien !).

Agrémenté de quelques phases percutantes en arabe, le titre éponyme a des résonances totalement d’actualité, sur une petite instru addictive signée Beep Beep (soit l’avatar beatmaker de Demi-Portion lui-même). L’évidente référence au monde de Dragon Ball Z, captée sans peine par les jeunes trentenaires qui n’ignorent rien de la quête des sept boules de cristal, installe une ambiance faussement naïve où le verbe malicieux du emcee sétois  n’en prend que plus de poids.

« Oui la France pète un plomb et s’invite en battle/Soit tu les suis soit tu les r’gardes en tant qu’spectateur/Et ils jouent qu’avec la peur donc j’fais quoi ma gueule ? »

 

Suit la savoureuse allégorie de Demi-Parrain, « à l’heure où l’argent facile arrive plus vite qu’une pizza ». On a eu l’occasion d’en goûter le clip jusqu’à plus soif, avec Saïd Taghmaoui l’un des inoubliables interprètes de La Haine en guest. Mais aussi et surtout, dans l’ordre d’apparition sur le son, El Gaouli pour lequel on confesse un engouement qui se vérifie largement par la suite… il faut dire que la partie de trombone de la célèbre partition de Nino Rota est un argument imparable ! De même que des rimes du genre « Joue pas la mafia non plus, dans c’cas-là vaut mieux s’taire/Un p’tit sample c’est suffisant pour un p’tit air de gangster », teintées de cet humour corrosif qui passe tellement bien la rampe quand il est porté par la faconde méridionale.

Si ce qui précède a déjà des allures de claque magistrale, le texte de Est-ce que est pour sa part un véritable direct au plexus. Entamé sur un extrait parlé de Will Hunting (Robin Williams en v.f.), il apparaît comme une punchline d’un bout à l’autre, entre problèmes du quotidien et questionnement existentiel. Sur des images de Montréal qui décidément ne nous lâche plus, on est happé par une simple mélopée lancinante, en adéquation avec un condensé d’interrogations personnelles en rafales serrées. Disparate au premier abord, il peut déranger les esprits trop cartésiens. Petit conseil et unique remède pour ceux-là : réécoutez, vous avez affaire à un bonhomme à qui nul n’a à apprendre la vie. Ni la philo, études poussées ou pas. « Est-ce que j’devais vous l’dire ? Autant d’questions sans réponse »…

 

Résolument mélomane, il insiste dans la veine orientale sur Loin de toi, auquel le chant de Blata donne un relief supplémentaire. El Gaouli assurant de nouveau la trame sonore, Demi-Portion se permet alors de poser un premier couplet en assonances tranchantes, que l’on peut considérer comme le plus ésotérique de l’album. Une sorte de paradoxe avec les accents chaâbi langoureux du refrain, avant que ne revienne au galop ce naturel allant jusqu’à l’autodérision, qualité plutôt rare dans le milieu. « Demain c’est loin vu qu’on m’a dit tu verras ça ira mieux/Ne t’en fais pas si j’reste c’est pour éviter les adieux »

Je n’ai pas voulu, et ses samples triés sur le volet, possède la tonicité hargneuse du beat up tempo, sans laquelle il n’est pas d’ouvrage hip hop bien ficelé. Canevas impeccable dans l’agencement des titres, débouchant au tiers de l’album sur LA collab tant attendue. Adoubement tranquille aux bons soins du maître Oxmo Puccino, dans un climat de respect mutuel tangible, Une chaise pour deux dégage une puissance poétique peu commune.

Venant derrière ce joyau, la déjà anciennement connue Poignée de punchlines, bénéficiaire du double sceau sonique de Give Me 5 et El Gaouli, ou encore Les nôtres, indispensable du fait de la présence de Sprinter le complice de toujours des Grandes Gueules, pourraient pâtir de la comparaison. Technique et complémentarité irréprochables contournent l’écueil avec panache.

 

Probablement mieux que On rap fort, où l’apport des énormes kickeurs Jeff Le Nerf et Neka semble survitaminé, se situant entre les plus intimistes et autobiographiques Dernier chevalier et Parti de rien qui nous ont tant touchés. Simple faute de placement, sans trop de dommage pour l’équilibre d’ensemble, toujours difficile à conserver sur soixante-cinq minutes d’un goûteux melting-pot.

Par contre, nous ne partageons pas les réserves invariablement émises autour des remixes de titres-phares conviant au festin tout ou partie de la famille artistique. A moins de vouloir en faire un truc plus touffu que les petits Larousse, Robert et Littré réunis, on voit mal comment Mon dico aurait pu offrir à chacun de ses contributeurs plus que les 4 mesures de rigueur en pareil comité élargi.

Au diable les ergotages ! L’enchaînement suivant tout en émotion emporte l’adhésion, non sans pincements au cœur. Ils témoignent pour le moins d’une écriture consistante, celle qu’on connaît depuis longtemps à « l’artisan du bic ».

Dominé par le bouleversant Laisse pas tomber, et plus encore l’immense Peur produit par DJ Rolex et rythmé par les palmas et taconeados nerveux du flamenco, le final est de ceux qui annoncent fièrement que le meilleur reste à venir.

Qui s’en plaindra?

Rap français : le réveil

Et puisque ce titre est un nouvel emprunt à Koma, une petite prière pour commencer :

Vite vite, maestro, un deuxième !!

 

Justement, un quatuor d’anciens vient poser son empreinte sur ce début d’année du rap français. Si parallèlement quelques zélateurs incontinents de la plus bête et méchante pétoire du monde pouvaient nous lâcher les baskets, ça nous arrangerait, merci ! Au moins pendant l’année 2015, qui s’annonce riche en sorties de qualité…

 

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Flashback sur la première année de ce siècle.

DJ Mehdi avait encore dix ans à vivre, et la Mafia K’1 Fry quelques friandises plus-hardcore-t’imploses à nous servir au dessert. Aussi ‘’Contenu sous pression’’, premier et unique effort  jusqu’à ce jour d’un rappeur sans tête (médiatiquement parlant), et sans flow bien reconnaissable, tranchait-il sérieusement sur les autres productions de la rugueuse constellation Vitry-Choisy-Orly.

Néanmoins Karlito, puisque c’est de lui qu’il s’agit, s’y révélait particulièrement subtil et introspectif. Au point d’en paraître abscons aux fans de ce collectif sérieusement enraciné dans la réalité brute de l’asphalte hurlante. Et par le fait, plus adepte des textes directs que de l’enchaînement crochet-uppercut.

Discret mais certainement pas effacé, le revoici dans une salve lyriciste des plus incisives. Moins allégorique que par le passé, plus imprégnée de cette atmosphère de jungle urbaine que la qualité technique des clips réalisés aujourd’hui rend à merveille.

Pour les Rolling Stones, « Undercover » fut l’album du début de la fin, aux dires de la plupart de leurs admirateurs.

Pour Karlito, c’est le premier titre d’un prometteur « Impact », qui pourrait bien marquer un nouveau départ. A vrai dire, on ne l’attendait plus. Quelques indices savamment distillés vers la fin de l’été dernier nous avaient pourtant mis à l’oreille une puce plutôt excitée…

 

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Si incroyable que cela puisse paraître, le tout jeune quadragénaire Lino n’en est lui aussi qu’à son deuxième solo. Alors certes, lui n’a jamais vraiment disparu de nos écrans radar, même en volant occasionnellement à basse altitude (ça lui arrive). Mais que le magistral « Paradis assassiné » n’ait un successeur qu’une décennie plus tard est assez significatif de la difficulté à se maintenir en pointe dans le rap game.

Surtout quand le bonhomme doit accepter que sorte sans son aval une compilation faite de bric et de broc (« Radio bitume » en 2012, qu’on dira moyen avec une prise de risque modérée)…

Après Mozart, Brahms ou Fauré, il aura donc pondu à son tour un Requiem de haute volée. Sincèrement, nul besoin qu’il soit d’anthologie, on parle tout de même là d’un mythique représentant des belles années du Secteur Ä !

S’il vous plaît Monsieur Bors, refaites-nous aussi du Ärsenik au niveau d’une certaine soirée à La Bellevilloise en décembre 2013… et big up au frérot Calbo !

 

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Considérer Demi-Portion le mal nommé (au regard de sa science pugilistique des mots) comme un vétéran, avec neuf ans de moins et un solo de plus que son glorieux aîné ci-dessus, peut sembler abusif. On assume…

Sur un plan professionnel, le demi-parrain de la connexion languedocienne est l’instigateur d’une flopée de compilations, mixtapes et freestyles d’excellent niveau. De par son vécu familial, on peut voir en lui l’archétype du gamin mal parti qui se fait un nom à la force de ses rimes.

 

Guidée par une prise de responsabilités excluant la dérive individuelle, sa maturité précoce l’a tranquillement mené à la reconnaissance par le grand public, avec son deuxième album « Les histoires ». Et la fidélité indéfectible de son auditoire de longue date en dit long sur l’authenticité du lien noué.

« Dragon rash » a créé une attente incroyable, et c’est totalement réjouissant. Parce que Rachid Daif est un type bien, et la dream team de mc’s invités ne s’y est pas trompée. Ni End Of the Weak Suisse et ses organisateurs (-trices, bien joué Güliz ;-), qui l’ont convié à parrainer l’épreuve.

Attention ! prévenons immédiatement l’argument classique d’une supposée promo par featurings interposés : Koma et Mokless la demi-Scred, Disiz, Aketo, R.E.D.K entre autres, sont de la partie pour un posse cut tel qu’on les aimera toujours, et la présence sur un titre du très stylé grand frère Oxmo allait presque de soi.

La grande majorité des morceaux porte la griffe du rappeur maroco-sétois, que le grand Georges aurait probablement adoubé s’il n’avait eu le très mauvais goût de disparaître deux ans avant sa naissance. Et  on a plaisir à y retrouver Sprinter, le complice des Grandes Gueules, ou encore Swift Guad au niveau qu’on leur connaît, c’est-à-dire à découvrir de toute urgence.

 

 

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Celui qui transforme ce brelan en carré est un peu l’opposé de Karlito en termes de stratégie ponctuelle, mais assurément pas dans l’esprit. Là où l’Orlysien déboule de nulle part pour nous balancer dans les gencives un album qu’on n’espérait plus, Nasme aurait plutôt tendance à nous faire le coup de l’Arlésienne.

Entendons-nous : Nasme l’Animal, le Biffmaker, dont la récente tournée a fait quelques salles combles aux six coins de l’Hexagone (hé oui ! nous avons quelques rudimentaires notions de géométrie) n’est pas vraiment du genre à poser des lapins. C’est juste qu’à son degré de talent et de notoriété, il est à nos yeux un cas unique dans le PRF (Paysage Rapologique Français) : collaborateur très prisé, artisan essentiel de connexions franco-belgo-helvéto-montréalaises de gros calibre, producteur de collègues méconnus sur le simple feeling (j’aime, j’te donne mon soutien technique), il n’a toujours pas sorti son premier album !

Excès d’altruisme? Pas impossible. L’homme est attachant, toujours disponible, détaché des contingences fatales à certains accros des sunlights. Le voir en concert, le plus souvent avec le poto Flynt dont il est quasiment indissociable, vous convainct réellement de la survivance de cette rebel music dont on a un peu perdu la trace.

En annonçant pour mars « Le Goût du pire », on est bien conscients de prendre un pari audacieux. Mais s’il devait encore être repoussé aux calandres de break, comme dit mon neveu marseillais préféré, on réécouterait avec le même plaisir ce flow inimitable, sur des textes entre ironie nonchalante et froide lucidité.

 

Par la faute de notre as de trèfle, il nous fallait un joker.

Il est tout trouvé. Il s’appelle Ali, c’est le monsieur sans qui Booba et 45 Scientific ne seraient rien. Il fut un pilier de Lunatic, le titre de son troisième solo, à paraître fin février, est celui d’un Pilier de la Sagesse.

QUE LA PAIX SOIT SUR VOUS !

Happy new EOW 2015 !!

Z’avez vu? Le bandeau, là-haut?

Cette fois c’est conclu, notez bien la date. Ce qui nous ravit, outre la joie d’accueillir la si pertinemment surnommée « Couteau Suisse », c’est de maintenir à notre manière un état d’esprit. Une sorte d’emprunt du souffle EOW, si vous voulez… Mais non, pas hhheeoowww ! ça c’est la bise de nord-est, et elle n’est pas très chaleureuse en ce moment.

On reprend : E-O-Dub ! E-O-Dub !!… voilà qui est mieux.

L’année 2014 était celle des 10 ans d’End Of the Weak France.

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coucou mes p’tits lapins! (comme dirait Cheeko, champion de France 2014)

On ne saurait décemment la boucler (quelqu’un a dit si, là ?) sans revenir sur cet anniversaire. D’autant que dix jours avant son terme, la fête parisienne du Petit Bain a été tout simplement somptueuse ! Les présents ce soir-là en attendent impatiemment des images professionnellement léchées.

Voyez déjà ci-dessous à quoi peut ressembler la prestation haut de gamme d’un « All Star » constellé de diamants. Soit bruts, comme Kt Gorique alors détentrice de la couronne mondiale à 22 ans ; soit déjà sertis à sa naissance     -ou peu s’en faut- dans le pavé de Boulogne-Billancourt, tels Kohndo et Dany Dan (respectivement de La Cliqua et des Sages Po’, ad vitam aeternam)…

 

 

Un peu d’histoire (-géo)

Bien, préservons-nous de tout parisianisme à la graisse de hérisson. La compétition a intelligemment essaimé, et depuis longtemps. Les challenges régionaux ont eux aussi quelques soirées mémorables à offrir à qui voudrait se plonger dans le Grand Bain de la communauté EOW… une Internationale du freestyle dont il n’existe pas d’équivalent.

USA, Royaume-Uni, France, Suisse, Allemagne : tous ces pays à forte implantation « rapologique » ont déjà vu leur représentant proclamé champion du monde End Of the Weak.

A commencer (soyons chauvins) par Artik à Saragosse en 2006, pour la première édition sous sa forme actuelle. Imité l’année dernière à Londres par RES, désormais Res Turner et (nous semble-t-il) presque jalousé.

 

Nooooon… ?! Si. Parce que tant que le freestyler vit sa passion dans sa piaule, ou la rue, puis dans des salles animées par un même esprit de partage, tout va bien. Les mâchoires commencent à se crisper s’il prétend venir bousculer la hiérarchie du rap biz (désolé, le rap game c’est autre chose).

Bon, une fois encore on s’éloigne du sujet.

 

Cessons donc cette déambulation hipopotamesque sur des plates-bandes entretenues par des jardiniers mieux avisés, ou plus consensuels.

Allez, on se mouille encore, pour le plaisir de la baignade… Du fait de tout son apport à la culture hip-hop, le Canada mérite d’avoir son EOW World Champion. Québécois et trilingue, ce serait en quelque sorte le bigarreau sur le cake. Et un background d’artiste pluridisciplinaire ne déparerait certes pas l’ensemble. Vous voyez à qui on fait allusion ?

Mais à Kampala le 25 octobre, le rappeur sud-africain Slege Lee a remporté le titre.

 

Magnifique symbole pour tout un continent : à l’instar de tous les autres emcee’s en lice, Monk.e l’a vécu et salué comme tel. Mentalité qui nous change sacrément des rituels moisis d’une arène dont les « combattants » bodysculptés ne se voient jamais à moins de cinq kilomètres… Ou gladiaviotent par séides décérébrés interposés !

The end of the wack

L’affrontement est une composante naturelle du hip-hop. Certaines figures de proue l’ont dénaturé, et cela fait mal au cœur (restons polis) des aficionados de longue date. Pas grave… reste les battles, et leurs bretteurs de la rime qui boxe. Même si le contexte est un peu différent, on les retrouve fréquemment dès les tours qualificatifs d’End Of the Weak. Où leur panoplie de kickeur affamé doit intégrer quelques qualités techniques indispensables pour ne pas se vautrer…

Ici à l’oeuvre en 2006 le « tireur » le plus rapide de tout l’Ouest : le Nantais Philémon, aîné respecté, l’un des plus doués de sa génération, pas encore cité dans le cours de cet article. Sa réactivité face au non moins talentueux Artik avait de quoi renvoyer sangloter dans leurs couches les Billy the Kid du moment. Lesquels ont bien grandi, mais Philémon continue de se balader…

 

Visuels et auditifs, les exemples ne manquent pas sur le net, servez-vous copieusement (Rap Contenders, WordUp! Battles notamment).

EOW est une confrérie universelle, dont les traces ne tarderont pas à être relevées outer space par la descendance du robot Philae (pas du tout, vous vous trompez ! il n’y a pas de moquette à la bibliothèque Couronnes)…  Son activisme est d’autant plus méritoire que dépourvu de toute visée lucrative. Ses coordinateurs(trices) sont de véritables hommes et femmes-orchestre peu soucieux(euses) de leur propre buzz, et que pourtant leur passion fait identifier très vite par les fans. Qu’il s’agisse de dee-jaying, de prosélytisme télévisuel et radiophonique, d’organisation des évènements, ou de fonctions manageriales au sens le plus noble du terme…

La famille en l’occurrence, ce n’est pas qu’une figure de style, c’est une réalité qui survivra à l’inéluctable déboulonnage des wack mc’s. En d’autres temps, ceux-là se seraient fait éjecter fissa de la scène. Un sort que ne méritera jamais le plus bafouillant des kids qui contribuent à bâtir l’aventure End Of the Weak, des fondations à la cime…

Saint-Denis’ zoo Brooklyn style

Un seul hêtre vous manque, et tout est des peupliers : « The Batard Blog » n’a rien publié depuis le 11 décembre. Dont acte…        [démenti constaté vers 22h30 : allez voir comment le thème de son nouvel article rend indispensable cette rectification  😉 ]

 

Ok ok. Cette double illustration sonore d’escroc (qui a les crocs) est juste un prétexte. Personne n’est nul au point de ne pas avoir vu le lien, dans le titre en carton de ce billet. Mais on est là pour se faire plaisir, pas vrai ?

Sûr qu’en fait de clip « bucolique », souhait précédemment exprimé, il en existe de plus verdoyants que ceux-ci. Mais tels quels ils sont une forme de transition facile pour le blogueur qui entend ajouter au lectorat familial les occupants de la maison mitoyenne.

Et figurez-vous qu’on n’a pas envie de quitter celle, déjà évoquée, qui jouxte Lutèce au niveau 1.8 côté 9.3… Alors Ra-fal, à toi l’honneur, en pleine nature en plus !

 

La dalle au mic, ce doit être la règle pour tous ceux qui débarquent dans le game aujourd’hui. Faute de quoi le nouvel arrivant vit simultanément, et à son insu, sa naissance et sa mort artistiques ! Fût-ce avec quelques millions de vues youtubesques en une semaine…  Car seuls les vrais resteront. Y compris certains qui nous déçoivent maintenant, mais dont le passé les dispense d’avocat à la noix, merci pour eux.

Authentik

Dans la bande à (Pascal) Tessaud, cette authenticité-là exsude par tous les pores de la peau. Si l’on savait écrire sur le sujet, on décernerait au réalisateur de « Brooklyn », torero instinctif dans l’arène exagérément codifiée du 7ème Art, la queue, les deux oreilles, et les cojones pour faire bonne mesure.

A défaut, on se rabattra sur la dimension musicale, qui d’ailleurs lui est tout aussi familière. En se gardant bien d’oublier le sérieux appoint de Khulibaï, activiste dionysien sonique de longue date –tiens, replacez les trois qualificatifs dans l’ordre que vous voudrez, ça tinte agréablement !

L’adéquation entre les personnages de ce bijou filmique et le rap qu’ils représentent est un gage de crédibilité, jamais atteinte encore à un tel degré dans le cinéma français. Issa donc, certes pas le personnage le plus attachant de l’histoire, va se planter humainement. Ra-fal Uchiwa qui l’interprète, probablement tout aussi ambitieux dans sa réalité de MC, semble peu enclin à suivre le même chemin. Jugez-en plutôt, ici .

Pour autant, pas question de baliser aussi schématiquement leur parcours. Car de son côté le très carré animateur Yazid (Jalil Naciri), par exemple, pourrait bien avoir à regretter les effets de sa rigoureuse probité. On ne le saura pas. Pas plus que les choix à venir de ceux dont il aspire, sans doute trop, à être « la conscience ».

Ne perdons pas le fil… on a dit qu’on parlerait zik, et commencé par Kt Gorique, freestyleuse dans l’âme

 

Sans même savoir alors qu’elle tenait le rôle principal d’un film parti de nulle part pour arriver partout (festivals de Cannes, Tubingen, Bucarest, Talinn, Tanger, La Havane, Milan, Soleure… on en passe !). Ni qu’elle, la championne du monde End Of the Weak 2012, nous ferait la joie et l’honneur d’un concert à la bibliothèque Couronnes dans quatre mois !

Notre moisson d’avril… on n’en est pas peu fiers. Dès que la date sera validée, l’ami Monk.e, confrère lui-même champion EOW, lui laissera la place sur le bandeau de tête ci-dessus.

La famille

Autre figure centrale de « Brooklyn, le film » : Diego l’hôte sympa, le grand frère nonchalant et frimeur, c’est Despee Gonzales, et c’est une sacrée bonne idée ! Parce qu’on n’en voit pas beaucoup d’autres capables de nous faire humer aussi véridiquement l’air de Saint-Denis…

 

Le flow très articulé qu’on lui connaît, ce pilier d’Ursa Major en fait sans surprise un atout maître. Comment en irait-il autrement, dans un film dont toutes les scènes n’obéissent qu’à une loi, celle de l’improvisation !

Chacun des acteurs « secondaires » est dans son élément. Pas seulement l’irrésistible comparse Babali Show (au jeu presque sobre pour la circonstance, ses proches n’en sont pas revenus !!), mais toute l’équipe. Ainsi Tony, collègue de Yazid pendant les ateliers d’écriture, est joué par Blade MC, dont la vidéo ci-dessous fournit une idée assez exacte des dons multiples

 

tandis que celle-ci lui offre l’occasion de poser (à 11:15) sur l’instru de « Brooklyn zoo », dans l’exercice de prédilection de toute bonne émission dédiée à la culture urbaine

 

La famille pour le coup y est quasiment au complet, prenez donc place et faites connaissance. Et puisque Dino Killabizz est lui aussi présent, on ne va pas se gêner pour convier au dessert un soce de l’autre côté du périph’ : l’homme de Biffmaker, à savoir monsieur Nasme dont l’imminent « Goût du pire » va faire du bruit bien au-delà de Landerneau…

 

Ha ha ha avouez que vous l’avez pas vue venir celle-là ! Que tous les rappeurs de Landerneau lèvent le doigt, de toute évidence vous êtes parmi les plus proches géographiquement de Brooklyn, dans ce p….. d’Hexagone !!